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Un territoire "tout compris"
Description du podcast
Le quotidien des no workers ne se réduit pas aux murs de leur logement. Il dépend tout autant de l’espace public que des services que la ville peut offrir. Quels sont les besoins de cette génération vis-à-vis du territoire qui les entoure ? Que peuvent mettre en place la ville et le territoire pour le confort des personnes âgées ? Comment décliner l’attractivité et l’accessibilité d’un quartier pour tous types d’usagers ? Comment repenser la mobilité selon les besoins des personnes âgées ? Quels lieux et activités, facteurs de lien social, peuvent être mis en place ?
Contenu du podcast
Propositions
- :
→ Fluidifier les parcours résidentiels à l’échelle de la ville et à celle du territoire.
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→ Qualifier l’espace public comme un espace de partage en privilégiant les mètres carrés « heureux » : qualifier des espaces utiles plus compacts pour élargir les espaces mutualisés tel que des zones de rencontres sécurisées.
- :
→ Rendre confortable la mobilité grâce à un maillage associant réseaux piétons et transports en commun, permettant l’accès à des aménités plus lointaines.
- :
→ Se doter d’outils pour des documents d’urbanisme intégrant les problématiques de la santé et de mobilité plus lente et mesurée.
- :
→ Favoriser le bien-être de chaque individu en plaçant la population au cœur des démarches d’aménagement de la ville.
- :
→ Concentrer les énergies de diverses entités publiques en créant un réseau de villes aidantes et hospitalières afin de répondre à la nécessité des logements pour les aidants au plus près des infrastructures médicales régionales
Périurbain et métropole, un vieillissement à deux vitesses
Le territoire français dans son intégralité est confronté au vieillissement de sa population. C’est même l’ensemble de l’Europe qui voit sa part de séniors augmenter de façon significative, modifiant les modèles connus jusqu’alors : « en 1990, les 0-25 ans pesaient 32 % de la population européenne quand les 60 ans et + en représentaient 20 %. En 2050, ces chiffres seront respectivement de 25 % (- 7 points) et de 35 % (+ 15 points)¹⁴.» Les territoires doivent donc faire face aux nouveaux besoins qu’implique cette mutation démographique inédite.
Les municipalités sont en première ligne face au vieillissement de la population : « lors du mandat municipal 2020-2026, la France va connaître une explosion des 75-84 ans de +30 %¹⁵.» Métropoles, villes moyennes, tissu périurbain ou communes rurales : les collectivités ont un rapport différent au vieillissement. Elles n’ont pas toutes les mêmes outils pour répondre à cet enjeu. En Île-de-France, on retrouve des situations contrastées¹⁶. Les espaces pavillonnaires du périurbain posent particulièrement question : c’est un urbanisme qui a été conçu principalement pour des familles, favorisant essentiellement les déplacements en voiture. Ces quartiers ont fait l’objet d’accession à la propriété durant les années 1970 et 1980. Ce sont des secteurs entiers qui voient aujourd’hui leur population arriver à l’âge de la retraite.
Cette population vieillissante a été pionnière dans certains territoires : comme les villes nouvelles telles Marne-la-Vallée. Ces habitants aujourd’hui sexagénaires ont participé au développement des territoires que nous connaissons aujourd’hui. Il est nécessaire, pour les aménageurs et les communes, de leur offrir la possibilité de poursuivre leur parcours résidentiel là où ils se sont largement investis et ont leurs attaches.
En d’autres termes, on se pose la question : comment composer une ville où les no workers peuvent continuer de s’épanouir malgré leur changement de statut ? Dans les territoires périurbains, il s’agirait de proposer un habitat intermédiaire : un logement faisant la transition entre la demeure familiale et la structure d’accueil pour personnes dépendantes. Les habitants choisiraient leur logement en fonction de leurs parcours de vie et leurs besoins, permettant un turn-over sur l’ensemble du parc immobilier du territoire.
Une telle stratégie permet d’intégrer chaque usager au sein de la ville, dans une logique de conservation et de renforcement des liens sociaux intergénérationnels. Dans son rapport, Luc Broussy parle d’encourager les mutations du parc social dans de « bonnes conditions » ; c’est-à-dire en s’engageant au maintien du niveau de loyer, en permettant un meilleur emplacement et un meilleur équipement du logement¹⁷. À Ormesson, la municipalité veut permettre aux plus anciens de poursuivre leur parcours résidentiel dans la ville, en tenant compte de leurs moyens financiers.
Cette population vieillissante a été pionnière dans certains territoires : comme les villes nouvelles telles Marne-la-Vallée. Ces habitants aujourd’hui sexagénaires ont participé au développement des territoires que nous connaissons aujourd’hui. Il est nécessaire, pour les aménageurs et les communes, de leur offrir la possibilité de poursuivre leur parcours résidentiel là où ils se sont largement investis et ont leurs attaches.
En d’autres termes, on se pose la question : comment composer une ville où les no workers peuvent continuer de s’épanouir malgré leur changement de statut ? Dans les territoires périurbains, il s’agirait de proposer un habitat intermédiaire : un logement faisant la transition entre la demeure familiale et la structure d’accueil pour personnes dépendantes. Les habitants choisiraient leur logement en fonction de leurs parcours de vie et leurs besoins, permettant un turn-over sur l’ensemble du parc immobilier du territoire.
Une telle stratégie permet d’intégrer chaque usager au sein de la ville, dans une logique de conservation et de renforcement des liens sociaux intergénérationnels. Dans son rapport, Luc Broussy parle d’encourager les mutations du parc social dans de « bonnes conditions » ; c’est-à-dire en s’engageant au maintien du niveau de loyer, en permettant un meilleur emplacement et un meilleur équipement du logement¹⁷. À Ormesson, la municipalité veut permettre aux plus anciens de poursuivre leur parcours résidentiel dans la ville, en tenant compte de leurs moyens financiers.
Accessibilité et mobilité, des enjeux majeurs
La pratique et la perception du quartier évoluent selon les besoins et la mobilité des personnes. Pour favoriser la dynamique d’une ville pour tous, il faut déployer un aménagement de proximité diversifié. La pleine intégration d’une population vieillissante s’appuie sur le maillage d’équipements publics et médicaux, et sur un réseau d’espaces verts. Il est également pertinent de penser la richesse sociale à travers la diversité des services proposés à l’échelle du quartier et à l’échelle urbaine. Ces démarches doivent s’orienter vers le maintien de la présence dans la ville des plus âgés, de sorte qu’ils ne soient pas restreints dans leurs déplacements.
Un autre critère participant au caractère accueillant d’un quartier est la répartition et l’accessibilité des commerces de proximité. En effet, la succession des commerces alimentaires le long des cheminements à destination des services tels que le bureau de poste, le bureau de presse ou encore le salon de coiffure, permet une pratique « allégée » du quartier, adaptée aux personnes âgées. Ces axes animés de la ville doivent être accessibles aux no workers et prendre en compte la vitesse de la flânerie.
Afin d’accompagner les personnes âgées dans leurs déplacements, il est pertinent de prioriser la sécurité des usagers des voies douces¹⁸. Cela passe, en partie, par un travail sur les dénivelés, afin de limiter les obstacles à la mobilité. À Chouzy, l’adaptation du centre-bourg rend la ville davantage parcourable par les plus vulnérables.
Les choix d’aménagement intérieur des commerces ne sont pas moins importants. Ces derniers disposent d’espaces communs pouvant être support d’animation ou de repos pour les visiteurs. Ils sont eux aussi générateurs de rencontres : une ressource non négligeable pour l’intégration de chaque individu dans la ville – lieu de vie, de partage, rencontre, mobilité, repos, travail… C’est la diversité des usages possibles qui permet l’épanouissement de chaque habitant. D’où le concept des « mètres carrés heureux », développé par Sonia Lavadinho.
L’intensité de la pratique de la ville repose en grande partie sur la qualité et la diversité des moyens de transports qui la desservent. La voiture ne doit plus être le seul moyen de locomotion possible les no workers qui préfèrent la marche ou les transports en commun¹⁹. La question de la mobilité chez les retraités est d’autant plus pertinente que cette population représente la catégorie « dont la mobilité s’est accrue de manière significative (15 %) au cours des 20 dernières années²⁰. L’épidémie de Covid-19 et les différentes mesures de confinement prises par les gouvernements, nous ont tous fait prendre conscience de l’importance de notre territoire immédiat, et de la manière dont on le parcourt. En d’autres termes, rendre les trajets nécessaires plus agréables, sécurisants et confortables est capital.
La pratique quotidienne de la ville par les no workers rappelle le concept de « ville du quart d’heure »²¹ mais ne peut s’y limiter : elle ne s’arrête pas aux portes de leur quartier. Yvette, par exemple, se rend régulièrement de Gennevilliers à la capitale pour garder des enfants. Il en est de même pour Sylvie qui, pour ses activités, fait le trajet entre Montrouge et Paris ; ou Maurice qui sort du Chesnay pour rejoindre l’association Les Audacieux. Ces trajets, plus longs, ponctuent la vie des no workers.
Une bienveillance accompagnée par l’action des villes
Le caractère accueillant d’un territoire se définit par le développement d’espaces publics inspirant un sentiment de sécurité et propices à la solidarité. Les villes peuvent être à l’origine de ces démarches ou bien les inciter. Cela permet de conforter un sentiment d’appartenance, un attachement au territoire, notamment chez les no workers : 62 % des plus de 60 ans revendiquent leur appartenance à leur commune²². Cette catégorie de la population s’investit d’ailleurs davantage dans la vie politique locale²³.
Les no workers participent donc pleinement aux décisions politiques au niveau local. Cette citoyenneté active est à valoriser et à prendre en compte dans notre perception des plus âgés.
L’intégration de nos aînés dans les territoires passe par d’autres facteurs qui peuvent être encouragés par la puissance locale. Nous avons identifié quatre leviers d’action dont disposent les Villes : le soutien à la vie associative, la participation citoyenne, la mise en place de services adaptés et enfin le recours à des aidants au sein de la ville. Il s’agit de comprendre en quoi ces différentes pistes permettent un épanouissement des retraités dans leur territoire.
En effet, c’est par l’implication associative que les no workers revendiquent leur citoyenneté et font vivre le territoire. De ce fait, les retraités peuvent être considérés comme les garants des liens sociaux qui unissent les habitants d’un même lieu. Les communes bénéficient de cette ressource, et stimulent donc ces initiatives.
Pour Christian Robache, c’est grâce à cette implication citoyenne que chacun participe à la fabrique de la ville. Il valorise ainsi la présence de tous lors de réunions de concertation.
La conception d’une ville bienveillante est plus aisément envisageable avec la participation de tous les citoyens. En ce sens, la Ville peut se doter d’outils orientés vers l’inclusion des séniors et des plus fragiles. L’objectif est de créer un urbanisme favorable à la santé²⁴. Par exemple, le plan local d’urbanisme intercommunal (P.L.U.I.) de l’établissement public territorial Est Ensemble prévoit de lutter contre l’habitat indigne et les logements insalubres, notamment dans les secteurs pavillonnaires qui subissent des divisions produisant parfois des logements de qualité médiocre. La Ville peut donc être motrice et accompagnatrice dans la préservation de la santé de la population.
Une ville où il fait bon vieillir est une ville qui offre des espaces et des services créant des opportunités de rencontres, d’échanges et d’accompagnements entre tous ses habitants. Il s’agit de concevoir un milieu où les limites, les franges entre générations ne sont pas discernables, mais où, au contraire, on peut trouver des transferts, des liens multiples et une concentration d’individus pluriels.
Enfin, la puissance publique doit également être interpellée par le rôle d’aidant qu’occupe une majorité des no workers. En effet, la part des retraités apportant leur aide à leurs aînés plus dépendants est non négligeable. Cette activité doit être facilitée par les infrastructures et les services que la Ville met en place. Il en va de même pour le personnel soignant, qu’il faut loger confortablement et stratégiquement au regard des lieux de prises en charge des plus vulnérables.
Le rôle des Villes est primordial : il garantit une proximité des institutions et des usagers, qu’ils soient âgés ou non. La Ville a également le pouvoir de favoriser les liens entre les individus eux-mêmes, générant des interrelations propices au bien-être de tous. Une ville bienveillante envers les plus vulnérables est une ville bienveillante pour l’ensemble de la population.
- 14:
Luc Broussy, rapport interministériel sur l’adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population, mai 2021
- 15:
Ibid.
- 16:
À Ormesson, les personnes âgées entre 60 et 79 ans représentent 21 % de la population globale, tandis qu’a Montévrain, cette tranche de population ne représente que 8 % de la population globale. (Insee)
- 17:
Luc Broussy, rapport interministériel sur l’adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population, mai 2021
- 18:
« Un piéton sur deux qui décède a plus de 65 ans » Luc Broussy, rapport interministériel sur l’adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires à la transition démographique, mai 2021
- 19:
L’utilisation de la voiture passe de 62 % chez les 60-74 ans à 51 % chez les plus de 75 ans (contre une utilisation de 64 % sur la population totale). De même, la marche à pied représente 30 % des pratiques chez les 60-74 ans, puis 40 % chez les plus de 75 ans (contre 22 % dans la population totale). Concernant les transports collectif leur représentation est de 4 % chez les 60-74 ans, puis 6 % chez les 75 ans et plus (les transports collectifs représentent 8 % des pratiques dans la population totale). Entd 2008
- 20:
Luc Broussy, rapport interministériel sur l’adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires à la transition démographique, mai 2021
- 21:
Concept mis en avant par Carlos Moreno, urbaniste et chercheur franco-colombien, professeur à la Sorbonne
- 22:
Concept mis en avant par Carlos Moreno, urbaniste et chercheur franco-colombien, professeur à la Sorbonne
- 23:
« Au 1er janvier 2020, 68,2 % des maires ont 60 ans ou plus et plus de 40 % des maires sont retraités ». Collectivites-locales.Gouv.Fr
- 24:
Institut Paris Region, Awada Fouad (dir. Publication), Intégrer la santé dans les documents d’urbanisme, Les carnets pratiques, n°13, 2021